Lettre d’émission.

À l’emmerdeur,

La présente est pour vous informer que je fuirai, à compter d’hier, votre establishment.

Voici un mois que je suis emmerdé de votre compagnie, et je ne crains plus de constater qu’elle contrevient à mes plus intimes convictions. Je tiens à préciser, davantage pour moi-même que pour sa majesté, qu’aucune raison de santé ou nouveau départ ne me force à quitter. Seulement, vous comprendrez sans doute ma hâte de partir, compte tenu de ma haine de pâtir.

J’ai connu l’entreprise bien avant que vous l’annexiez à votre portefeuille et je puis vous dire avec tout mon irrespect qu’elle fut naguère un endroit où il faisait bon travailler. Ce temps étant révolu, j’ose espérer que vous tardiez maintenant à trouver un nouvel employé sous-payé acceptant de se faire engueuler quotidiennement pour des fadaises ou des fraises.

J’aimerais au passage souligner qu’il m’a été pénible d’endurer votre chiant aplomb boomer­ et votre pédantisme, de même que votre VUS. Votre irresponsabilité à l’égard de la société n’a d’égal que mon mépris pour vous. Par ailleurs, sous aucune considération je n’en aurai pour les monarques qui, parce qu’ils ont réussi à force d’artifice et de mensonge, croient comme vous en avoir à remontrer aux potentiels serfs.

C’est pourquoi, m étant une lettre de démission et aussi de majeur, je vous les adresse conjointement.

Acceptez avec déshonneur mes salutations indistinctes,

Votre infidèle cavalier,
moi.

Je vous dominerai.

« Vous savez ce qu’on dit dans ces circonstances? Hein?

Bande d’ignares, vous n’osez même pas savoir. On dit « pff ». On dit « zzzut! ». On dit « meu oui, meu oui! ». Ou encore on dit « Cause toujours, tit cul, mais commence par faire de l’ordre dans tes jouets ». Mais vous ne savez pas, ce qu’on dit.

Vous ne me le dites pas. Vous en pleurez, plutôt, pauvres branchies bouchées d’estampillettes moites. Vulgaires souliers de cuirette usés. Chiffons malodorants. Bécanes rouillées sans roues qui roulent. Z’êtes caves. Z’êtes mous. Z’êtes pas meilleurs que moi. Quand on sait parler en réunion, faire plier les patrons, parler aux dames, stopper les blagues grasses des non moins gras plombiers, alors quand on sait faire tout ça, on ne dit pas « Ga’dons le bô bébéi! Allô! ta ta ta toi… »

I will dominate; un jour, quand j’serai grand… »

Il rit d’une voix stridente et on lui mit sa suce entre les dents.