Sur un barreau de fer peint en noir

Les deux mains collées sur un barreau de fer peint en noir. Les deux bras en extension perpendiculaire à cette clôture qui ceignait le Jardin, j’étais une protubérance de la ceinture. Moine en jeans et chemise blanche, je disais malandrin défroqué, un ventre flasque, une conséquence de mes gavages intellectuels.

Des échassiers, des bouffons et des lions parcouraient les chemins asphaltés qui liaient encore à cette époque le Jardin au reste du monde. Ô découverte! ô Vérité révélée! Dans une absolue fermeture d’esprit, j’en avais oublié que par là même où j’étais entré existait une voie de sortie, une voie de retour, sans détour : un chemin direct entre ici et là. L’aller-retour est possible, entre la Connaissance et le Quotidien. Suis-je bête!

Échapper aux murailles du Savoir exquis et doucereux n’est pas une quête incertaine. C’est une aspiration normale, commune et réalisable, à condition d’efforts minimes et de force morale.

Les deux mains collés sur un barreau de fer peint en noir. Un mur translucide et pourtant imposant, insurmontable et pourtant on y passe aisément un ou deux bras. Malgré l’impressionnante construction, il suffit, pour sortir du Jardin, de passer par la grande porte.

J’en informai mes compères, d’un cri abrutissant. Un écho de crystal vibrant me répondit: le Jardin était déjà vide.

3 réflexions sur « Sur un barreau de fer peint en noir »

  1. …la preuve que ce qui nous apparaît parfois comme un labyrinthe inextricable, s’avère souvent plus droit qu’on le pense…merci pour ce texte magnifique.

  2. Le chemin le plus court entre deux point est toujours la droite, dit le scientifique.

    Mais pas le plus intéressant, rétorquent les autres, fussent-ils tristes.

  3. Les écarts de conduite, les tentations impulsives et les passages souterrains nous gardent en vie…quelques éclats de verre crêvent parfois les pneus de notre véhicule mais on s’en fou. L’important c’est d’avancer et de ne pas rester sur sa faim. À mort les regrets. Vive les chemins tordus qui goutent si bon.

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